Après une courte et agréable navigation de nuit, nous voilà maintenant sur Sao Nicolau ; l’île la plus rurale et la plus authentique du Cap-Vert car elle est restée à l’écart des circuits touristiques. De forme allongée, elle est soit-disant « raisonnablement montagneuse » mais son plus haut sommet, le Monte Gordo, volcan primitif, culmine tout de même à plus de 1300m. C’est donc un tout autre paysage capverdien que nous découvrons là. Canyons encaissés, vallées, et même verdure et humidité… Et ce, même si le versant sud de Sao Nicolau, où se trouve le mouillage principal, est bien plus aride que la côte nord.
Au petit matin, nous plantons notre pioche devant le village de Tarrafal ; port de pêche et de commerce de l’île. Devant nous s’étend une courte plage de sable noir, réputée pour sa qualité et pour ses vertus thérapeutiques. Peu de vent sur le mouillage actuellement, la quinzaine de voiliers présents barbotent paisiblement sur leurs ancres… Nous trouvons place à proximité du brise-lames, en croisant les doigts pour ne pas gêner les manœuvres du gros ferry qui débarquerait ici une fois par semaine. On verra bien hein !
Mouillage de Tarrafal et plage noire, iode et titane bons pour les rhumatismes…
Contraste entre architecture rurale (maisonnette plein pied à gauche en pierre et toit en bois/paille) et les nombreux autres bâtiments en ciment, à peine finis, sans toiture, ni peinture…
Nous débarquons d’abord sur la plage puis directement au quai des pêcheurs où là nous sommes accueillis par tout un groupe de gosses « gardiens d’annexe » qui proposent/imposent leurs services. Petite rémunération facile, c’est donc à celui qui choppera l’amarre en premier ! Première confrontation de ce type, nous en sommes un peu décontenancés… Dans la rue, ils nous appellent « Capitaines » et des gamins tous jeunes se proposent même pour aller gratter notre antifouling bien toxique sous la coque ! Arf, et l’école !? Et pourtant, et pourtant… Le Cap-Vert a un des meilleurs taux d’alphabétisation de l’Afrique de l’ouest. Mais soucy : grosses disparités car scolarité obligatoire mais payante…
Sur l’île, tous les bestios ont été importés. On croise une multitude de biquettes, souvent accompagnées de leurs petits, qui broutent placidement mais qui ne se laissent pas approcher. Aux odeurs, on reconnait sans difficultés les porcheries éparpillées sur les hauteurs de la ville. Et chaque soir, bonhommes mais surtout femmes vont et viennent pour les nourrir en portant le plus souvent la bassine de bouffe sur la tête… Pas mal de vachounettes aussi ! Et trois poules ! Et… Y’a le mystère des moutons sacrés, bêtes ou précieuses ou fragiles devant être parquées et cachées du regard des gens derrière de hautes grilles/tôles… Voilà, j’arrête avec mes descriptions animalières, c’est la campagne quoi ! :)
Tout au bout là-bas, un grand hôtel pas fini mais déjà à l’abandon…
Gamins pêcheurs qui eux ont le coup de main !
Le Cap-Vert est réputé pour ses eaux très poissonneuses et pour être ainsi un bon spot de pêche sportive. En effet, chaque jour, les pêcheurs du coin ramènent de très belles prises. Parmi celles-ci, thons énormes, espadons, marlins bleus tant convoités et parfois même… squales ! Parlons-en, paraîtrait qu’il n’est pas rare que ces requins viennent rôder dans le mouillage une fois la nuit venue attirés par les restes de poissons près du port… Paraitrait aussi qu’une fois, on en a vu un de plus de deux mètres juste à côté des bateaux en journée. Et paraitrait même qu’un plaisancier se serait fait bouffer les mains au mouillage en vidant un poisson… Mouai. C’est ce qui se raconte par là ! Radio Ponton adore ces histoires-là… :)
Toujours est-il qu’en voyant quotidiennement des mômes, pas plus grands que trois pommes, ramener avec facilité plusieurs poissons d’affilés, et bien j’ai eu envie d’essayer ! Hop, j’attrape une ligne plombée ainsi qu’un hameçon. Au bout, j’essaie d’y faire tenir un morceau de poisson-volant séchant sur le pont depuis deux jours. Et à l’eau le bazar ! Peut-être un coup de pot mais c’est une réussite ! 1er jour : cinq petites carangues, 2ème : un joli baliste et pour finir : un moche carrelet ! Classe ! Tiens et on a eu aussi la chance de découvrir le mérou rouge ou Garoupa (très miam) sur Contre-temps, « petit cata » (hein ? :) également au mouillage… Salut au passage aux basques du sangria vert ! ;)
Nos diners…
5 jours et 5 heures de mer pas peu sympas je vous disais ! Aller je vous raconte… Rapidement car les récits de navigation sont parfois un peu longs à lire… Nous sommes donc partis mercredi matin de La Gomera pour une notre plus longue vadrouille océanique du moment ! 750 milles quand même nous séparent de Sal, cette petite île située au nord-est du Cap-Vert.
Départ ! Au revoir Gomera…
Un grain, des dauphins et même des globi accompagnent nos premiers milles, ça y est c’est parti ! Cap au 206° youhou… Bilan de la première journée : moué bof, sentiment mitigé… Petite et courte houle croisée, vent faiblard pour commencer, des grains qui trempent, nuit méga fraiche froide, toute petite lune, pas de poissons, un peu de près et beaucoup de trois quarts arrière… On s’dit qu’tout ça, bah c’est surement du au fait qu’on est encore trop proche des Canaries mais que ça devrait bien se poser en s’éloignant hein ?
Le lendemain : cela se corse ! La houle grossit aïe… et toujours croisée crotte ! Côté vent, ça va. Il est heureusement bien présent et ne nous quittera plus du voyage… Ces 25 à 35 nœuds de nord-est nous permettent enfin de faire route voiles en ciseaux. Nous tenons les 6-7 nœuds malgré nos 3 ris GV et notre moitié de génois tangonné. Une coryphène mord à l’hameçon, super… Mais la question est maintenant de savoir qui va (réussir à) le vider et puis qui va (réussir à) le cuisiner sans vomir son quatre-heures !? Faut dire que ça commence à rouler pas mal là ; la mer n’étant pas vraiment confortable hum… Toutes les manœuvres se font avec harnais capelé sur les lignes de vie. Le soleil ne s’est pas trop montré aujourd’hui, on est bon pour faire tourner le bouzin ! Les batteries commencent à bouder car le frigo, les feux de nav’ et surtout le pilote consomment… Mais il faut tout de même souligner l’excellent travail de ce dernier.
Début du troisième jour : déjà … milles parcourus. Coté mer, ça devient gros, méchant et vraiment désespérant. Les vagues sont de plus en plus hautes et certaines déferlent tout à côté de nous. Deux régimes de houle nous arrivent dessus, un plein cul et un autre un peu plus Est… Et celui là, il nous remue bien. Nos activités sont à présent réduites au minimum. Plus de pêche. Le vent est assez régulier malgré de grosses rafales… Yoda pionce beaucoup ; surement l’amarinage… Elle s’est aussi bouffer la descente en sautant au mauvais moment avec le roulis. Aïe raté ! Ah et JR commence enfin à dormir, pas longtemps certes mais il parvient à faire quelques petites siestes…
Surf !
Quatrième matin. Nouveau jour, nouvel espoir de voir la mer s’apaiser. Et non, au contraire, c’est pire et tout chaotique ! Le bateau roule sans arrêt, c’est costaud. Nous surfons, parfois un peu sur le travers, parfois joliment jusqu’à atteindre les 12 nœuds ! Le matou veut absolument aller s’balader devant et grimper dans le lazzy bag, ça va pas nan ! Fin de journée, les vagues nous passent par dessus et je manque de finir à la baille lors d’un coup de gîte. Tout est trempé et complètement salé… Quand une déferlante remplit le cockpit, là on s’dit que ça suffit. Nous nous réfugions à l’intérieur. De l’eau salée s’engouffre dans le carré par dessous la descente fermée et par le seul panneau de pont laissé en ventilation. On étouffe reclus dans le bateau. Le mal de mer m’emporte ainsi que Yoda, mais contrairement à moi, elle pète la forme dessuite après ! Dans la nuit, JR nous / se fait une mauvaise blague en déclarant soudainement, après un aller-retour cabine arrière, que la barre est bientôt cassée, qu’il va peut-être falloir barrer avec la barre de secours qu’on n’a jamais testée et puis avec cette mer dehors… Coup de stress ! Jean-Rémy plonge dans le foutoir de la cabine avant pour en retirer la barre franche. Oui, je n’vous ai pas dit, les deux placards de devant et tout se qu’ils contenaient se sont effondrés, y’a du bordel partouuuut ! Il est question de fuite d’huile… J’ai pas tout saisi. Mais bon un quart d’heure après, il me dit que finalement non y’a plus de problème !! Enfin, il n’y en a jamais eu haha… Ca remue toujours autant. Seuls réconforts à présents : le sommeil qui fait passer le temps plus vite et le fait de savoir qu’on arrive très bientôt yé !
Dire qu’on pensait naviguer à moitié à poil…
Dès le lendemain matin, nous apercevons les petites montagnes de Sal. Quel plaisir c’est de se voir arriver à destination. Un bonheur de se dire qu’on y est, que l’effet shaker c’est bientôt fini. Au niveau de la pointe nord, le vent accélère alors que nous croisons un pêcheur solitaire dans une petite barcasse. Un sympathique bonjour et il continue sa route. Bienvenue au Cabo Verde…
Merci Cyril pour la météo ! :)
Mi-octobre, les journées raccourcissent maintenant à vue d’œil. Il ne faisait même pas encore jour lorsque nous avons quitté l’île de Tenerife ce matin…
Et sinon, que dire de cette navigation de 55 milles qui nous a conduits sur l’île de La Palma ? Pas grand chose en fait, elle s’est effectuée sur le même bord au près bon plein. Ah si, quelques minimes réglages de voiles mais bien rien de comparable à ceux de nos dernières nav’ ! :) Nous avons marché à une vitesse de 5/7 nœuds tout le long et bien sûr nous avons du réduire au fur et à mesure.
A l’arrivée, un gros et vilain grain nous fonçait droit dessus… Moi derrière, je commençais à enrouler mes lignes tout en me désespérant de n’avoir rien pêcher depuis un moment quand j’ai pu voir un poisson venu d’on-n’-sait-zou attaquer mon maous leurre ! C’est encore une coryphène ! Dire qu’il y a trois mois, on ne pensait en trouver que sur la transat’.
Nous trouvons facilement une place dans la nouvelle marina de Santa Cruz dont l’entrée, c’est vrai, ne se remarque pas de suite. Le port est bien vide. Nous devons être une dizaine de voiliers en tout, c’est vraiment calme…
L’accueil est super sympa, les gus gentils et la nuit coute ici 20,50 euros. Quelques ferries accostent parfois le long du quai en béton mais sans dérangements car le port de plaisance est à l’écart. On va surement y rester quelques jours, le temps de visiter l’île…
Le lendemain, nous partons en balade à travers Santa Cruz, la capitale. Peu de monde dans les rues, il règne ici une atmosphère reposante. Rues pavées, petites ou vieilles maisons pastel, fameux balcons canariens, nombreuses places ombragées… On aime bien :)
Au revoir Graciosa. Nous relevons l’ancre car le vent souffle maintenant de sud et il ne fait pas bon rester dans les parages dans ces conditions là. Nous nous mettons sous voiles pour passer le Rio tout en restant sur nos gardes par rapport à l’effet Venturi des montagnes. Peu de vent, nous trainons un peu… Au niveau de la pointe nord de Lanzarote, c’est autre chose ! Nous voilà face à 20-25 nœuds dans le nez ! C’est donc parti pour tirer des bords très très serrés. Malheureusement nous finissons par abandonner le combat car en fait, le vent longe la côte snif’. Le temps est tout maussade, c’est un peu tristounet comme navigation. Juste avant que l’obscurité nous tombe dessus, nous parvenons à notre abri pour la nuit avec une bonite pour le diner. Renaissance mouillera avec trois autres voiliers devant le Castillo San José juste à côté du port de commerce. C’est pas vraiment jojo mais ça ira comm’ça.
Le lendemain, nous repartons pour atteindre un mouillage plus au sud. Entre Papagayo et Playa Blanca, nous hésitons. Nous optons pour la dernière, plus proche des commodités la ville car on n’a plus rien de frais à manger à bord. Bref, Renaissance se retrouve à l’ancre devant la marina Rubicon par 6m d’eau. Attention au fond, caillasse et même câble par endroit ! Sinon l’abri est correct et y’a même possibilité, moyennant quelques euros, d’avoir le net sur le bateau. Les environs sont bofs mais la promenade maritime est aménagée. On trouve entre autres un supermarché dans le truc du port, des bars/resto tout le long de la promenade entre des boutiques touristiques qui vendent toutes la même chose. Nous recroisons un bateau connu, l’occasion d’un petit apéro sympa chez eux (coucou si vous nous lisez :) et puis le lendemain, nous partons vadrouiller sur l’île…
Graciosa
Pour se faire, nous louons chez Cicar une voiture pour 30euros la journée. On s’retrouve avec un monospace bon et bien en route ! La chaleur est épouvantable ici. Nous sillonnons les grandes routes toutes droites de l’île comme toutes les autres voitures de location en fait hum…
Champs de figuiers de Barbarie…
Lanzarote, c’est brut, hostile, aride et chaud.
Nous traversons des champs gigantesques de lave noire pétrifiée pour atteindre de jolis petits villages qui font figure d’oasis en apportant un peu d’ombre et de verdure. Concernant l’architecture sur l’île, on ne peut que remercier Manrique ; maisons chaulées, pas de panneaux publicitaires, protection des sites naturels, un maximum de quatre étages pour les immeubles, etc…
Un coup d’œil aux salines de Janubio, les plus grandes de l’archipel, avant de filer vers El Golfo et sa jolie lagune verte qui a une teneur en sel est plus élevée que celle de la mer morte…
Aux sources bouillonnantes, nous ne resterons pas longtemps car il y a beaucoup trop de monde sur ces sentiers labyrinthiques…
Notre route passe au cœur du parc naturel de Timanfaya et des montagnes du Feu (toujours en activité) où la roche prend différentes teintes de rouge, d’ocre et de noir… C‘est cool ici mais pas d’arrêt possible, c’est soit le bus ou soit le dromadaire pour crapaüter dans le coin car la faune et la flore n’ont pas encore repris leurs droits…
Dans la vallée de la Geria, nous ferons connaissance avec la culture sèche de Lanzarote où de fragiles plantations sont protégées par de petits murets en arcs de cercle. Quel boulot ! C’est ici, sur cette terre difficile, que pousse maintenant le meilleur malvoisie de l’archipel avec celui de La Palma…
Fin de journée, nous revenons à bord fatigués et avec un sentiment mitigé de ce que nous avons pu voir aujourd’hui de l’île. Pour tout dire, c’est dépaysant certes, mais nous sommes plus fana de paysages verts et luxuriants lol ! Demain donc, nous reprenons la mer pour continuer notre visite de l’archipel. Prochaine destination : l’île brune de Fuerteventua, surnommée la désertique ! (Euh…)
Recherches qui ont permis de trouver cet article :
- https://vasil cyou/
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