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De Catalina…

Le lendemain, nous rejoignions l’Isla Catalina après une navigation nuageuse sous génois seulement. Vent léger léger. Plus nous nous éloignions vers l’ouest et plus la houle de sud-est nous malmenait ! Heureusement nous étions presque parvenus à destination. C’est sous un ciel bien chargé que nous sommes arrivés sur l’île à l’heure où tous les bateaux de tourisme repartaient vers les hôtels.
Grosse difficulté pour mouiller, fond encombré, pénible ! Impossible de distinguer quoi qu’ce soit par manque de soleil, de viser un patch de sable et donc de crocher ! Après deux tentatives, nous arrêtons tout. L’ancre est bien descendue mais c’est uniquement le poids de la chaîne qui nous maintiendra en place cette nuit. Espérons que cela ne souffle pas trop…
L’île ne nous paraît pas terrible mais est réputée pour ses magnifiques tombants sous-marins. Nous n’en verrons pas la couleur puisque demain, nous décollons tôt afin d’arriver de jour à Boca Chica…
Retour à la civilisation, six jours qu’on n’a pas croisé d’autres humains suffisamment près pour être à portée de voix !
Des sauvages mais vous le savez déjà… ;)

Charter classe !

Charter moins classe (et vous n’avez pas la musique qui va avec !)

Yoda qui aimerait bien s’farcir un ou deux piafs !

Encore un flamboyant malgré la couverture nuageuse… Plus de vent, gros roulis !

Coin pommé

On commence à connaître la rengaine maintenant. Quand tu arrives dans un nouveau pays, tu as l’obligation de déclarer ton entrée avant de pouvoir poser un pied à terre. Tu hisses ton pavillon jaune à bâbord et tu es sensé attendre les officiels. Bon pas aux Petites Antilles sinon tu peux toujours poireauter ! Comme nous ne comptons pas rejoindre tout de suite le port d’entrée de Boca Chica, nous allons essayer de nous faire tout petit petit. J’ai bien envie de rejoindre la plage mais il est plus sage de laisser l’annexe ficelée sur le pont. JR restant sur le bateau à bricoler, nous pourrons toujours prétexter un arrêt forcé pour cause d’avarie moteur en cas de contrôle inopiné… Je pars donc à la nage dans le turquoise, traînant derrière moi un pare-batage afin d’être plus repérable par les bateaux à moteur qui sillonnent la baie. 1,2km de nage aller-retour, ouf, ça paraissait beaucoup plus proche sur la carte et avant de sauter à l’eau ! Ah Saona m’en a fait baver, heureusement c’est avec le vent que je rejoins le bateau ! :)
A mon retour, je retrouve le capitaine qui a réparé l’antenne GPS et qui a presque terminé de bidouiller dans le moteur. Une fois fini, nous relevons l’ancre avec l’intention de mouiller devant la plage de Las Palmillas, juste quelques milles plus au nord. Parce que comme dit belle-maman, c’est bien joli ces petites îles désertes mais hein bon…
Soucy, le waypoint indiqué par Frank V. nous amène bien jusqu’à une bande de sable mais là encore, nous sommes à 10 bornes de la terre. Nous ralentissons pour tenter de nous rapprocher du rivage. Il n’y a pas beaucoup d’eau, mais de grandes zones de corail et des bancs de sable mal cartographiés. OpenCPN ne nous est pas d’une grande utilité car nous remarquons que les profondeurs indiquées ne correspondent pas du tout à ce que nous avons sous la quille. Navigation à l’œil et au sondeur… pour enfin trouver un mouillage sauvage en bordure de cote et dans du sable. 1m80 d’eau sous la quille, l’ancre est posée ! Position de notre coin pommé (…)

En nous rapprochant du nord, nous avons perdu les cocotiers mais cela ne nous empêche pas d’aller vadrouiller à terre ! Fin de la balade, la soirée tombe et les nonos se régalent de notre sang tout frais. Nous nous grouillons donc de rejoindre le bateau en nous faisant engueulés au passage par des espèces de corbeaux pas contents qui nous hurlent dessus…

Raie pastenague jaune ! On ne l’aurait pas vu si JR ne lui avait pas marché dessus, la pauvrette !

Pêcheurs locaux, haïtiens ?

Et enfin, un super coucher d’soleil pour clôturer la journée…

Devant Saona

Il est 11h quand nous nous approchons de l’Isla Saona, une petite île au sud-est de la République Dominicaine. Elle fait partie du parc national d’El Este et est aussi belle en vrai qu’en photo. Nous longeons de magnifiques plages baignées d’eau turquoise et bordées d’innombrables cocotiers… C’est beau, pratiquement pas construit et nous avons hâte d’y poser notre ancre après ces deux jours passés en mer.

Malheureusement, il y a énormément de corail et nous ne pouvons pas mouiller là où on le voudrait. Frank V, auteur du seul guide nautique en RD, guide gratuit en plus (on le remercie), nous indique un mouillage à Punta Catuan.
Mais comme celui-ci est mal protégé du nord-est, nous ne le trouvons pas très adéquat avec ces 20 nœuds de vent. Nous cherchons plutôt un mouillage sous le vent de l’île. Premier essai en pensant que le fond était ok mais erreur, nous relevons ! Nous finissons par mouiller au sud de Punta Delfin, tout à l’est de la plage, enfin dans du beau sable turquoise ! Il n’y a pas beaucoup d’eau sous la quille, du coup Renaissance se retrouve assez loin du rivage. Tant pis, sommes fatigués, en avons marre de tourner donc ça ira très bien pour le moment !

Peu de temps après, c’est l’invasion touristique ou comment pourrir une plage déserte en même pas une heure. Une vingtaine de maxi cata musique à fond arrivent, mouillent dans le corail et débarquent leur bonne cinquantaine de passagers sur la plage. Transats bien alignés, l’excursion Saona est rodée ! La mode est de se prendre en photo avec une étoile de mer dans la main, pauvres bêtes brassées à longueur de journées. Fort heureusement, leur vacarme ne dure que quelques heures et vers les 15-16h, nous nous retrouvons seuls devant une île qui redevient enfin jolie…

 

Cap sur la République Dominicaine !

Le programme est simple : faire 260 milles pour rejoindre Hispaniola en contournant par le sud l’île américaine de Puerto Rico. Les gribs nous annoncent un petit temps : 10 à 15 nœuds de vent et une très petite mer : 1m. Du presque jamais vu ! Donc normalement, une navigation plus que tranquille en prévision…

Nous levons l’ancre vers 10h30 laissant derrière nous Norman Island et ses îles voisines.
Renaissance s’habille de ses voiles et file au sud-est sur une mer réellement toute plate. Le temps est radieux et nous bénéficions d’un vent tout juste suffisant pour marcher au ¾ arrière puis pour tangonner. En fin de journée, nous doublons les Iles Vierges Américaines. Tandis que nous sommes au large de Vieques, une vedette des US Coast Guard s’approche et fait route avec nous un bon moment… Nous sommes en train de louvoyer à cause du vent pas très régulier donc j’imagine que notre comportement les intrigue ! Certainement un peu tard, mais nous nous posons la question de la limite de leurs eaux territoriales. Arf, nous n’en avons aucune idée ! JR croit lire 12 milles sur OpenCPN donc nous prenons la décision de nous écarter plus au sud pour être certain de ne pas être embêté…

Lorsque la nuit tombe, le vent fait de même. Plus un souffle d’air ne nous parvient. Nous sommes contraints d’affaler les voiles car elles ne tiennent plus, et nous devons démarrer le moteur. Toute la nuit sera ainsi, ronronnante, sous une lune noire mais dans un environnement au final étonnement clair. Le halo lumineux des grandes villes se réfléchit dans les nuages et nous pouvons compter les étoiles.

Ces filous d’US Coast Gard reviennent en douce. Les voilà maintenant qui foncent sur nous à toute allure et tous feux éteints. JR aura même le droit aux coups de projecteur dans la gueule ! M*rde, sommes-nous encore trop prêts ? Bon repiquons encore un peu plus au sud…

Le deuxième jour, nous sommes sous Puerto Rico et capons plein ouest. Au petit matin, nous sommes surpris par quelque chose qui retombe dans l’eau avec fracas juste à côté de Renaissance. Un coup d’œil et nous apercevons une vingtaine de dauphins qui viennent jouer à l’étrave. Immense plaisir car cela faisait drôlement longtemps qu’ils ne nous avaient fait l’honneur de leur compagnie !

A part ça, nous sommes pour ainsi dire… pétolifiés ! Le moteur est toujours en marche. A chaque risée, nous tentons de remettre les voiles mais rien. Nous avons 5 nœuds de vent réels au portant, ce n’est pas suffisant du tout.

Une nouvelle vedette apparaît à l’horizon et nous fonce encore dessus. Vite, j’enlève le foulard qui couvre ma tronche du soleil mais JR demeure toujours aussi barbu ! Pas très loin de nous, elle s’arrête enfin, rode un moment et refait demi-tour après avoir lancé quelques mots incompréhensibles sur la VHF. Nous n’y comprenons que dalle mais le message « Tiger 2.2 » n’a pas l’air de nous concerner…

Petit stress de la journée, d’un coup nous remarquons que l’électronique s’est éteint tout seul ! Flip car nous n’avons plus de pilote automatique non plus ! JR bidouille, le pilote revient mais son fusible saute par deux fois. La vraie cause du problème est découverte peu de temps après : le fil de l’antenne GPS était coincé et entaillé par l’évacuation d’eau du moteur. Nous avons donc débranché le GPS et la commande du pilote est revenue. Le sondeur restait muet. C’est en fait la seconde fois qu’il nous fait le coup. Tout juste arrivés aux BVI la semaine dernière, JR avait du passer quelques heures à réparer le sondeur qui buguait et l’éolienne qui sifflait anormalement. Réinitialisation du boîtier directement au pilote et le sondeur remarche ! Heureusement, car nous allons bientôt avoir très besoin de lui. C’est un peu nos yeux en arrivant sur une nouvelle zone de mouillage. Sans lui, c’est la mierda surtout si la carte n’est pas détaillée ! Restera donc à réparer le fil de l’antenne GPS à l’arrivée, pas pressé…

En fin d’après midi, l’océan se lisse de plus en plus et devient mer d’huile. Mais où sont les 10 nœuds annoncés sur les gribs ? En soirée nous atteignons notre waypoint et il est maintenant temps de virer au nord-ouest. Nous sommes à l’entrée du Mona Passage, ce fameux chenal de 80 milles qui sépare la République Dominicaine de Puerto Rico. C’est un coin très malfamé des Antilles, la mer peut s’y lever très vite en cas de coups de vent.

Nous passons dans le plus gros banc de thons que nous n’ayons jamais vu ! Ça saute de partout, c’est impressionnant. A ce moment là, je me mors les doigts d’avoir remonté ma ligne de traîne trop tôt. Ça me titille de la remettre à l’eau mais il fait presque nuit et JR m’en dissuade car nous avons une nouvelle vedette des US Coast Gard au cul ! Encore ! Ils sont vraiment louches, enfin peut être pensent-ils la même chose de nous ! Peut être nous surveillent-ils pour voir si nous ne tentons pas de rejoindre leur terre sacrée à la nuit tombée. On a du mal à comprendre leur comportement et lassée, j’ai bien envie de leur crier à la VHF qu’on en a rien à faire de leur pays pourri et que non Puerto Rico ne nous intéresse pas !

D’un coup, nous récupérons du vent ! Nous nous précipitons pour hisser les voiles et nous voilà partis plein pot à 6.5 nœuds, et sur le bon cap en plus ! L’obscurité majore notre impression de vitesse… Fallait nous voir, nous étions tous contents ! Manque de bol, ça ne dure pas et 20 minutes plus tard, nous sommes à nouveau scotchés dans la pétole ! D’énormes grains nous encerclent maintenant et la nuit à venir s’annonce beaucoup moins calme que la précédente.

Après 24 heures de moteur quasi non stop, enfin nous pouvons le faire taire ! Nous récupérons dans le Mona Passage 15-20 nœuds de nord-est qui nous suivront jusqu’à la fin du voyage. Nous voguons à présent sous génois seul, pas bien vite mais c’est déjà un exploit ! Le chenal est long, la nuit est noire et nous sommes ballottés par une double houle très très courte de nord-est et de sud-est… Cette partie de la navigation devient carrément désagréable, d’autant plus que le vent forcit. Aussi, le passage est très fréquenté, une quinzaine de bateaux croiseront notre chemin. Coup de gueule contre ces gros paquebots tellement éclairés comme des sapins de noël qu’on ne distingue plus leurs feux de navigation ! Au radar, nous visualiserons également les cowboys américains toujours là, cachés à 3 milles devant nous, encore tous feux éteints… Ils traquent sûrement les clandestins principalement cubains et haïtiens qui tentent de rejoindre une vie meilleure…

Enfin le lendemain matin, nous approchons franchement de notre destination. Sur la ligne d’horizon apparaît doucement un bout de terre pas bien haut mais qui semble couvert de végétation. Passé la pointe sud de Saona, ce n’est plus que du bonheur : mer plate et toujours autant de vent !

Isla Saona nous voilà ! :)

En bref, navigation moitié moteur, moitié voile.
Si nous n’avions pas touché de vent dans le Mona Passage, se serait poser la question du manque de carburant car nous n’avions pas refait le plein avant de partir… Pas bien !
Sinon rien pêché… Tout’façon, tous mes hameçons dégoulinent de rouille.
Sommes contents d’avoir passé le Mona avec peu de vent annoncé, seulement 5 nœuds sur les gribs alors qu’on a pris plus du triple !
Bon et alors, c’est à combien de milles les eaux internationales ? Edit : 12 miles !
Avons eu de la chance de ne pas nous être fait « arrêter » par les US cowboys. Certains équipages ont du mettre en panne pour une fouille du bateau + vérification d’identités en pleine mer… Pas cool !