A Boca Chica !

C’est après 35 milles terriblement houleux que nous avons débarqué dans cette petite marina de la côte sud de la République Dominicaine, toute proche de Santo Domingo la capitale. Navigation pourrie, inconfortable, sous un soleil de plomb avec très peu de vent. A l’arrivée, ça y est, nous nous prenons du 20 nœuds plein sud mais il est déjà temps d’enrouler car nous nous approchons du chenal menant au port industriel. La houle rentre plein pot et ça déferle sévère à proximité de l’îlette La Piedra. Nous étions précédés par un petit catamaran roots qui je pense n’avait pas de cartes marines car il se rapprochait dangereusement de la barrière de corail qui encercle la marina. Nous passons devant et ouvrons la route. En contrepartie, nous bénéficions de leur appel VHF à la marina (équipage espagnol, parfait) pour les prévenir de leur (notre) arrivée. Echange de bon procédé ! Derrière La Piedra, la mer se calme et un pilote du port nous rejoint car il y a peu de fond et c’est assez régulier que les bateaux touchent et restent plantés dans le sable en tentant de rejoindre les pontons. Nous passons devant une marina privée, le Yatch Club et sommes enfin devant la marina ZarPar. En fait, pas de souci de profondeur d’eau, et deux bouées rouges permettent de contourner le banc de sable du milieu. L’eau y est turquoise, c’est drôlement beau mais pouah que de vent ! Nous loupons en beauté notre manœuvre d’appontement et le nez du bateau racle contre le bois. Et une balafre de plus, une !

Enfin amarré au ponton carburant, c’est une dizaine de personnes qui nous tournent autour. Nous ne savons pas qui est qui mais le bonhomme de la marina parle un peu français et tente de nous expliquer ce qui va se dérouler. Nous passons à la phase pas sympa des formalités d’entrée. Joyeux bordel ou tout le monde nous parle en même temps et où on essaie de suivre du mieux qu’on peut mais nous sommes complètement dépassés. Un se tire avec les papiers du bateau, un autre avec nos passeports, un autre encore avec notre VHF portable parce que la sienne ne marche plus… Deux bonhommes montent à bord, un pour le contrôle de drogue et un autre à la mine patibulaire et en uniforme de la Marina de Guerra. Fouille ou plutôt fouillette du bateau, quelques placards ouverts… et contents, ils nous tapent deux barres chocolatées et s’en vont en jetant les emballages à la mer… Direction maintenant la capitainerie où là nous nous prenons un bon coup de massue quand la gentille dame de l’accueil nous annonce avec un grand sourire que ça fera juste 180 $US uniquement pour l’entrée ! Ohoh non mais dis moi que j’hallucine. 180 $US ! Là, je commence à faire un peu la gueule quand elle nous dit que c’est obligatoire partout en République Dominicaine, blabla, baratin… et elle aussi du coup, elle perd également son sourire, surtout quand on lui demande pourquoi, et qu’on lui dit qu’on comprend pas du tout… Normalement et officiellement, nous devons payer uniquement 63 $US pour l’entrée. 43 pour le bateau et 10 par personne pour la carte touristique. Alors oui, je sais bien qu’en République Dominicaine, les autorités sont particulièrement corrompues, aiment beaucoup les dessous de table mais là quand même… C’aurait été 100 $US, nous aurions probablement raqué sans trop poser de questions. Mais là je trouve que c’est abusé surtout comment la chose est présentée. Bref, de toute façon, nous ne possédons même pas cette somme à bord et bien sur, ils ne veulent que du cash. Nous expliquons au gentil et arrangeant bonhomme de la marina qu’on ne veut pas et qu’on ne peut pas payer le triple du vrai prix et… étonnement, après une petite discussion, ça passe ! Direction maintenant l’immigration pour régler la somme due donc de 63 $US, tampons sur les passeports et retour au bateau, c’est fi-ni. On est satisfait, on s’en est pas trop mal sortis mais n’osons pas crier victoire trop vite. Et oui, y’aura encore la sortie à faire…

A savoir que les frais d’entrée dans le pays varient énormément selon le port dans lequel vous vous trouvez. Chacun fait à sa sauce. Le plus cher serait apparemment Lupéron au nord… Attention de bien récupérer les visas touristiques et le visa du bateau sinon vous êtes bons pour repayer dans le port suivant. Ensuite à chaque changement de port, il faut demander un despacho de sortie et en refaire un à chaque arrêt. Normalement c’est gratuit, mais en pratique ça tourne souvent entre 10 et 20 $US. La combine consiste donc à demander un despacho pour un port assez loin sur la route, et s’arrêter mouiller où bon nous semble en prétextant un problème mécanique, un besoin de repos… avant de rallier le port en question.

Bon à part ça, la marina est clean bien qu’un peu chère. Comme la plupart des autres bateaux de voyage, nous choisissons donc de prendre un corps morts (une dizaine de disponibles) pour la somme de 18 $US par jour, avec eau gratuite et accès aux commodités. Wifi gratos aussi. Machines à laver plus qu’abordables…

Marina ZarPar tout confort…

Sur bouée, c’est parfait…

Nous partons vadrouiller dans les environs et découvrons Boca Chica, petite station balnéaire peut être un peu glauque où plusieurs grands complexes hôteliers ont été construits. Sa plage principale est très réputée notamment pour les habitants de Santo Domingo qui viennent s’y prélasser le week-end. Par contre, nous n’y traînerons pas nos tongs après la tombée du jour car Boca Chica est aussi connue pour ses chaudes nuits, sa prostitution et ses trafics en tout genre… Nous avions choisi d’atterrir ici car nous voulions poser le bateau dans une marina le temps de se promener sur l’île. Et puis, nous ne voulions pas côtoyer les milliardaires et le monde fabuleux de Casa De Campo…

La plage de Boca Chica… Juste à droite, le port.

Le long de la plage…

Vente de tableaux à Boca Chica

De Catalina…

Le lendemain, nous rejoignions l’Isla Catalina après une navigation nuageuse sous génois seulement. Vent léger léger. Plus nous nous éloignions vers l’ouest et plus la houle de sud-est nous malmenait ! Heureusement nous étions presque parvenus à destination. C’est sous un ciel bien chargé que nous sommes arrivés sur l’île à l’heure où tous les bateaux de tourisme repartaient vers les hôtels.
Grosse difficulté pour mouiller, fond encombré, pénible ! Impossible de distinguer quoi qu’ce soit par manque de soleil, de viser un patch de sable et donc de crocher ! Après deux tentatives, nous arrêtons tout. L’ancre est bien descendue mais c’est uniquement le poids de la chaîne qui nous maintiendra en place cette nuit. Espérons que cela ne souffle pas trop…
L’île ne nous paraît pas terrible mais est réputée pour ses magnifiques tombants sous-marins. Nous n’en verrons pas la couleur puisque demain, nous décollons tôt afin d’arriver de jour à Boca Chica…
Retour à la civilisation, six jours qu’on n’a pas croisé d’autres humains suffisamment près pour être à portée de voix !
Des sauvages mais vous le savez déjà… ;)

Charter classe !

Charter moins classe (et vous n’avez pas la musique qui va avec !)

Yoda qui aimerait bien s’farcir un ou deux piafs !

Encore un flamboyant malgré la couverture nuageuse… Plus de vent, gros roulis !

Coin pommé

On commence à connaître la rengaine maintenant. Quand tu arrives dans un nouveau pays, tu as l’obligation de déclarer ton entrée avant de pouvoir poser un pied à terre. Tu hisses ton pavillon jaune à bâbord et tu es sensé attendre les officiels. Bon pas aux Petites Antilles sinon tu peux toujours poireauter ! Comme nous ne comptons pas rejoindre tout de suite le port d’entrée de Boca Chica, nous allons essayer de nous faire tout petit petit. J’ai bien envie de rejoindre la plage mais il est plus sage de laisser l’annexe ficelée sur le pont. JR restant sur le bateau à bricoler, nous pourrons toujours prétexter un arrêt forcé pour cause d’avarie moteur en cas de contrôle inopiné… Je pars donc à la nage dans le turquoise, traînant derrière moi un pare-batage afin d’être plus repérable par les bateaux à moteur qui sillonnent la baie. 1,2km de nage aller-retour, ouf, ça paraissait beaucoup plus proche sur la carte et avant de sauter à l’eau ! Ah Saona m’en a fait baver, heureusement c’est avec le vent que je rejoins le bateau ! :)
A mon retour, je retrouve le capitaine qui a réparé l’antenne GPS et qui a presque terminé de bidouiller dans le moteur. Une fois fini, nous relevons l’ancre avec l’intention de mouiller devant la plage de Las Palmillas, juste quelques milles plus au nord. Parce que comme dit belle-maman, c’est bien joli ces petites îles désertes mais hein bon…
Soucy, le waypoint indiqué par Frank V. nous amène bien jusqu’à une bande de sable mais là encore, nous sommes à 10 bornes de la terre. Nous ralentissons pour tenter de nous rapprocher du rivage. Il n’y a pas beaucoup d’eau, mais de grandes zones de corail et des bancs de sable mal cartographiés. OpenCPN ne nous est pas d’une grande utilité car nous remarquons que les profondeurs indiquées ne correspondent pas du tout à ce que nous avons sous la quille. Navigation à l’œil et au sondeur… pour enfin trouver un mouillage sauvage en bordure de cote et dans du sable. 1m80 d’eau sous la quille, l’ancre est posée ! Position de notre coin pommé (…)

En nous rapprochant du nord, nous avons perdu les cocotiers mais cela ne nous empêche pas d’aller vadrouiller à terre ! Fin de la balade, la soirée tombe et les nonos se régalent de notre sang tout frais. Nous nous grouillons donc de rejoindre le bateau en nous faisant engueulés au passage par des espèces de corbeaux pas contents qui nous hurlent dessus…

Raie pastenague jaune ! On ne l’aurait pas vu si JR ne lui avait pas marché dessus, la pauvrette !

Pêcheurs locaux, haïtiens ?

Et enfin, un super coucher d’soleil pour clôturer la journée…

Devant Saona

Il est 11h quand nous nous approchons de l’Isla Saona, une petite île au sud-est de la République Dominicaine. Elle fait partie du parc national d’El Este et est aussi belle en vrai qu’en photo. Nous longeons de magnifiques plages baignées d’eau turquoise et bordées d’innombrables cocotiers… C’est beau, pratiquement pas construit et nous avons hâte d’y poser notre ancre après ces deux jours passés en mer.

Malheureusement, il y a énormément de corail et nous ne pouvons pas mouiller là où on le voudrait. Frank V, auteur du seul guide nautique en RD, guide gratuit en plus (on le remercie), nous indique un mouillage à Punta Catuan.
Mais comme celui-ci est mal protégé du nord-est, nous ne le trouvons pas très adéquat avec ces 20 nœuds de vent. Nous cherchons plutôt un mouillage sous le vent de l’île. Premier essai en pensant que le fond était ok mais erreur, nous relevons ! Nous finissons par mouiller au sud de Punta Delfin, tout à l’est de la plage, enfin dans du beau sable turquoise ! Il n’y a pas beaucoup d’eau sous la quille, du coup Renaissance se retrouve assez loin du rivage. Tant pis, sommes fatigués, en avons marre de tourner donc ça ira très bien pour le moment !

Peu de temps après, c’est l’invasion touristique ou comment pourrir une plage déserte en même pas une heure. Une vingtaine de maxi cata musique à fond arrivent, mouillent dans le corail et débarquent leur bonne cinquantaine de passagers sur la plage. Transats bien alignés, l’excursion Saona est rodée ! La mode est de se prendre en photo avec une étoile de mer dans la main, pauvres bêtes brassées à longueur de journées. Fort heureusement, leur vacarme ne dure que quelques heures et vers les 15-16h, nous nous retrouvons seuls devant une île qui redevient enfin jolie…