Archives du mois de avril, 2014

Sur la côte nord…

On attaque maintenant la partie la moins sympa de notre périple à Cuba : la remontée sur 180 milles de la côte nord-est de l’île. Au programme : vent de nord et nord-est, pratiquement dans le nez donc, pour les cinq prochains jours et contre-courant côtier ! Sympa…

Nous sommes donc partis de Los Morros pour une journée de navigation à tirer des bords au près serré dans le golfe de Guanahacabibes. Après une quarantaine de milles ainsi, c’est au moteur et juste à l’heure de l’apéro que nous sommes arrivés à Cayo Buenavista. 30m dans 2m50 d’eau, le bateau ne risque pas de bouger ! Officiellement, Cayo Levisa est le seul arrêt autorisé sur cette partie du littoral cubain. Officieusement, il y a des cayes à mangroves partout et les possibilités d’arrêts ne manquent pas ! J’imagine que le débarquement doit être toléré sur les cayes inhabitées, mais surtout pas sur l’île mère ou à proximité d’un village ! Les autorités ont bien trop peur qu’on embarque un cubain ou qu’on débarque du matos de communication…
Cayo Buenavista est une îlette complètement recouverte de dense mangrove et qui sert  d’habitat à de nombreux oiseaux. Nous ne débarquerons pas, ce sera juste un stop dodo.

Mouillage devant Cayo Buenavista

Fins de journée, Yoda émerge et se met à jouer !

Le lendemain, rebelote, nous sommes de nouveau en route ! Vent parfaitement de face (très frais ce vent de secteur nord) et comme nous avons choisi de passer à l’intérieur de la barrière de corail, nous nous appliquons à suivre parfaitement la route tracée et les waypoints indiqués par Frank. Profondeur minimum rencontrée : 2,90m au départ, ensuite ça le fait… Le soleil est bien présent et nous aide à visualiser la barrière, les bancs et les patates de corail isolées dans une eau toujours très claire.
OpenCpn est par contre à la ramasse concernant les profondeurs !

Pas beaucoup d’eau sous la quille !

A l’arrivée, nous posons l’ancre devant la pointe sud de Cayo Jutias. Ici le décor change, nous sommes face à une jolie plage de sable blanc couronnée de pinèdes. C’est beau comme tout et super calme ! A la nuit tombée, un bateau de pêche viendra mouiller juste à côté de Renaissance. Quelques minutes plus tard, deux pêcheurs à la rame viennent frapper à la coque pour nous proposer des langoustes. Ah ça tombe parfaitement, on était en train de se demander ce qu’on allait faire à manger ce soir… Une bouteille de rhum pour quelques crustacés, cela semble être le deal attendu. Nous leur souhaitons une bonne soirée arrosée ! Cinq minutes plus tard, le bateau remonte son ancre et nous écoutons le ronron de son moteur disparaître dans la nuit noire…

A Cayo Jutias

 Les reliefs de Cuba en arrière-plan

Travailleurs du coin

Coucher de soleil nuageux, espérons une nuit sans grains (pas gagné…)

Le lendemain, c’est journée repos à bord. C’est en dégustant quelques crêpes (miam) que nous planifions la suite du programme ainsi que nos prochaines escales aux Bahamas… Pas facile car notre guide de navigation me semble très peu fourni et mal foutu. Je pense déjà qu’on va atterrir sur Bimini, c’est le plus court de toute façon, et qu’on verra bien une fois sur place. Selon la météo et… au feeling ! :)

Passage du cap

Le vent ayant tourné, la houle aussi, il est temps de reprendre la mer. Pour cela, nous empruntons la passe de la Cucana pas aussi évidente que nous le raconte le bouquin. D’ailleurs, nous l’aurions tenté de nuit la dernière fois (c’était l’option 1 rappelez-vous), et bien il y aurait maintenant l’épave de Renaissance comme balisage ! Normalement, nous devions passer au sud d’une baraque à pêche tout en suivant un certain cap. En fait, notre route passe exactement sur la baraque qui n’est plus, il n’en reste qu’un pieu dangereux dépassant de 10 cm hors de l’eau… Parfait pour déchirer une coque hum.

Pêcheurs (à la voile) dans la passe de la Cucana

En fois en mer, nous nous mettons à la voile toujours sous génois seul, car vent léger et trop derrière pour le moment. Renaissance avance bien sur une mer plus potable que rencontrée ces derniers jours. Je crois voir quelque chose d’inhabituel sur l’eau à quelques centaines de mètres de nous, peut-être une grosse gerbe d’eau… Oui ! Cool ! Ce sont nos premières baleines qui s’éclatent à sauter hors de l’eau ! Il était temps et on espère bien en recroiser (de loin hum) autour des Açores…
A la tombée de la nuit, nous sommes au niveau du premier Cap (la pointe ouest en comporte trois), le Cabo Corrientes. La lune est des nôtres et nous longeons le littoral et ses phares.
Encore une fois plus nous remontons, et plus nous gagnons en confort à bord, la houle passant derrière nous…
Au petit matin, nous doublons le Cabo San Antonio, point le plus à l’ouest de Cuba. Il fait doux, la mer est calme et tout va bien. Encore quelques milles et nous commençons à distinguer quelques constructions sur la côte.
Renaissance suit le balisage menant à « la marina » de Los Morros qui est en fait un simple quai en béton dans un coin complètement perdu. 8h30, des pêcheurs sympathiques attrapent nos amarres et nous voilà donc à présent sur la côte nord de Cuba !
Arrivée du bonhomme très gentil de la guarda, remplissage de la paperasse… Nous souhaitons faire un peu de gasoil et nous mettre au mouillage. Il nous faudra revenir demain au ponton pour récupérer notre despacho avant de partir.
Nous avons poireauté toute la journée à attendre le pompiste qui devait venir à midi. On l’a vu débarquer à 14h pour nous dire qu’il reviendra à 18h… Arf. Bon et bien, nous passerons finalement la nuit au quai ! Nous y faisons la connaissance des pêcheurs avec qui nous discutons un moment et qui nous troquerons discrétos quelques langoustes contre une bouteille de rhum. Leur bateau est un des derniers en bois et leur rafiot très bien entretenu est un papy de 70 ans ! (Les suivants sont en ferro-ciment et les derniers en plastoc). Ils nous racontent leur pêche et offrent à Yoda des espèces de sardines… Mais se marrent devant notre snobinarde qui ne mange que du poisson cuit ! Un autre voilier nous rejoint un peu plus tard au ponton, un vieil américain sorti tout droit d’un vieux film et une italienne, qui ont du se dérouter suite à un problème moteur alors qu’ils partaient des Etats-Unis pour Panama. Ils sont cool et nous bavardons avec plaisir avec eux…
Le soir, nous irons nous balader rapidos au milieu des nonos dans le parc naturel de Gua… et acheter quelques victuailles dans la mini épicerie du port.

La nuit sera agitée. Un petit vent de nord a encore levé un sale clapot et Los Morros est complètement ouvert au nord. Nos deux voiliers sautent et tirent sur leurs amarres contre le gros quai en béton.

Bon, il est temps de récupérer notre despacho et de partir pour trouver un meilleur abri. Une chose est certaine, nous garderons en souvenir la gentillesse de tous les employés de ce mini port du bout du monde…

Renaissance à la marina de Los Morros

Mauvais plans

On le sait ; y’a des jours, vaudrait mieux rester couchés…
Nous quittons de bonne heure et pas de très bonne humeur le mouillage de Caleta Francès devenu très inconfortable.
Aujourd’hui, nous partons pour une longue navigation de 120 milles puisque nous envisageons de contourner directement la pointe ouest de l’île et de rejoindre la marina de Los Morros. Nous partons après un avis météo qui devrait nous garantir des conditions plutôt calmes tout le long de la traversée. Par contre demain soir, arrive une houle de 2m de nord-ouest sur la côte nord de Cuba. Normalement, pas bien grave puisqu’à côté de Los Morros, il y a le Cabo de la Lena, mangrove trou à cyclone dans laquelle nous pourrons nous cacher si besoin… A vrai dire, nous avons beaucoup hésité à patienter ou non le temps que ce petit coup de nord passe. Mais bon, aller ça devrait le faire et si vraiment, ça ne va pas et bien, on fera marche arrière car le mouillage de Maria La Gorda 40 milles avant ne sera pas praticable car il annonce du sud-ouest à son niveau…
La journée se déroule pas trop mal malgré toujours une houle cette fois-ci de sud qui nous embête. Nous ferons près de 45 milles sur la route. En soirée, nous reprenons un grib pour être certains de passer le cap dans de bonnes conditions. L’endroit n’est pas super bien réputé et notre guide Imray nous incite à la prudence. Le Cabo San Antonio fait face à la pointe du Yucatan et entre ces deux bouts de terre, s’écoule le Gulf Stream, un puissant courant (de 2 nœuds jusqu’à 7 !) qui porte au nord en longeant les Etats-Unis. Courant au large, contre-courant côtier annoncé, coin un peu décousu, une mer qui gonfle rapidement sous un vent contraire… Le passage du cap doit donc se faire dans le calme.

Aïe, le fichier grib du soir nous annonce que la houle de nord-ouest arrivera finalement beaucoup plus tôt, en fait en plein quant on y avancera notre quille ! Pas vraiment de vent annoncé, juste ça… La question du coup, est de savoir si voui ou non, ce sont toujours des conditions clémentes. Gros doute n°2 !

Merdouille !

Le passage du cap se fera de nuit et j’avoue que ces nouvelles prévisions ne nous enchantent guère. Nous pesons le pour et le contre, et finalement prenons la résolution de ne pas continuer. En ayant eu ce dernier fichier météo avant de partir ce matin, c’est simple nous ne serions pas partis. Le fait que nous soyons déjà en route et que nous ayons déjà parcouru tant de milles (pour rien) doit il peser dans la balance ? Assurément non.
L’idée de nous dérouter fait baisser un peu le stress qui s’était installé à bord. Peut-être que finalement le passage du cap se serait bien passé. Oui mais si ça n’était pas le cas ? Grosse houle poussant sur la terre, probablement rien qu’au moteur, bof… En même temps 2m ce n’est pas énorme énorme, mais c’est tout de même 3 fois plus que ce qu’on a d’habitude sur les fichiers météo !
Alors bonne résolution ? Excès de prudence ? Sagesse ? Trouille sans réel fondement ?
Bon aller on arrête de réfléchir, tachons maintenant de trouver un endroit ou nous poser pour la nuit ou plutôt pour ce qui va en rester… et surtout facile d’accès !
Maria La Gorda impraticable car trop ouvert + fond de corail.
Donc seule escale possible à plusieurs dizaines de milles sur les cayos de San Felipe. Un mouillage au sud derrière deux belles patates de corail affleurantes, fond irrégulier et à proximité de roches, bof surtout par houle de sud. Donc mouillage au nord de ces cayes en passant derrière la barrière de corail. Pour y arriver, option 1) la passe la plus courte, non balisée, soit disant avec 2.2m de profondeur au minimum, option 2) qui nous rajoute 15 milles de route en contournant tout le récif par l’ouest mais qui nous place en eau saine avec un minimum de 5m d’eau…

Bref, nous voilà repartis pour 45 milles en faisant le grand tour et en tablant sur la sécurité car une arrivée en pleine nuit est à prévoir ! Heure d’arrivée estimée : 5h du mat’ arf. Inutile de dire combien ça nous fait chier de faire autant de route et d’en avoir fait un max pour rien, qu’on s’en veut d’être parti, et surtout d’avoir attendu le soir pour reprendre un grib… Conneries ! Nous aurions du attendre patiemment…
L’air est chargé et nous faisons cap au nord droit sur les éclairs qui zèbrent le ciel un peu plus loin. Sympa. La lune tarde et la fraîcheur nocturne nous gagne.
Arrivée donc vers les 4h30 au nord de Cayo San Juan, inhabité donc aussi noir que la nuit. Prudemment, nous nous sommes avancés en vérifiant que la terre était bel et bien au bon endroit sur le radar, OpenCpn étant un peu à la ramasse… Et enfin, avons balancé l’ancre dans 3m d’eau. Marche arrière plein pot ; nous sommes crochés ! Au lit ! Demain est un autre jour…

Route d’aujourd’hui, détour…

Le lendemain, nous émergeons vers midi un peu patraques. Nous sommes mouillés au milieu de pas grand chose, à très bonne distance et au nord d’une caye à mangrove. Il n’y a pas un souffle d’air, il fait une chaleur à crever. D’énormes nuages noirs nous passent au dessus de la tête et nous apercevons quelque chose qui se déplace sur l’eau. Rooh la poisse ! C’est une trombe marine (tornade sur l’eau) qui est à 1 ou 2 milles de nous mais qui heureusement s’éloigne et qui semble aussi s’éteindre… Cool le coin !

Oui, on n’y voit pas grand chose sur ma photo, la trombe est loin et en fin de vie.
Dans le ciel, le trait blanc est le haut du « tube »
Sinon, ça ressemble à ça !

Journée glandouille et baignade, JR en profite pour nettoyer l’hélice et la coque de Renaissance au milieu de mini méduses non urticantes. A son retour, je le coince pour une coupe de cheveux largement méritée et prévue depuis… des mois ! Adieu tes vieilles dreads pourries ! :) Plus tard dans l’après-midi, un second voilier viendra nous rejoindre au mouillage. Nous serons donc deux à nous faire brasser la nuit suivante à cause du fort clapot levé par un vent de nord plus fort que prévu…

Jolie Caleta Francès

Le lendemain au réveil, j’ai hyper hâte de sortir dans le cockpit pour découvrir le décor qui nous entoure. La baie est large, coupée en deux par un banc de corail et possède quelques jolies plages. La couleur de l’eau est encore sublime…
Nous attrapons palmes, masques et tubas et sautons dans la barquette pour visiter tout ça. Direction la pointe sud de la baie où un ou deux bateaux de plongée profitent de la zone. Sous l’eau, nous découvrons une vie sous-marine particulièrement riche ainsi que plusieurs travées de coraux… Le fond plonge rapidement, si bien que nous regagnons les faibles profondeurs en poursuivant de gros poissons inconnus au bataillon.
Nous suivons ensuite le littoral en longeant le corail surmonté d’une dense végétation. De nombreux oiseaux volent au dessus de nous. Certains nous intriguent car ils ressemblent à des rapaces. En nous approchant, nous observons qu’il s’agit peut-être de gros vautours, oui ce sont des urubus à tête rouge !

Côté falaises de corail

Coté plage du sud

L’après-midi suivant, nous débarquons à terre nous dégourdir les orteils. Des sentiers de randonnées ont été aménagés. Celui qui longe la plage serpente au milieu des palmiers verdoyants et nous offre quelques points de vue remarquables sur la baie… Celui qui part vers l’est nous entraîne dans une dense forêt assez sombre pour l’heure. Partout, les oiseaux gassouillent. Ici, les arbres ont vraiment du mérite à pousser sur ce sol corallien… Leurs racines s’étendent à l’horizontale ne pouvant pénétrer dans une quelconque terre.
Le soleil diminuant de plus en plus, nous sommes contraints de rebrousser chemin. Pas que nous ayons peur de l’obscurité en forêt, mais plutôt parce que les moustiques se font de plus en plus voraces ! Une dizaine de piqûres me démangent vivement, j’ai envie de rentrer en courant ! Nous regagnons la plage, puis le bateau à l’heure où il vaut mieux s’éloigner de la terre et l’abandonnée aux gloutons.

De retour à bord, deux aigrettes nous font le spectacle. Elles tournent et retournent autour de nous en s’approchant de plus en plus. Fatiguée peut-être, elles se poseront en haut du pataras pour un bon moment, faisant de notre tigresse une excitée de première ! On se marre en observant Yoda qui ne cesse de leur brailler après ! Tentatives multiples pour aller les déloger, essais pour grimper au mât, en passant par les drisses… :)

En vagabondage sur l’île au milieu des palmiers

Petit individu rencontré en chemin

Sauras-tu repérer la pastenague ? Facile…

Mouillage de Caleta Francès, Juventud

Notre nouvelle girouette !

Qui est loin de plaire à tout le monde ! :o)

Notre deuxième nuit ici sera quelque peu chaotique. La houle ayant probablement tourné plus au sud, le bateau a énormément roulé rendant le sommeil difficile voire impossible. Il est grand temps de partir vers d’autres contrées…