Port Camargue – Sète, cette galère

Nous sommes mardi 10 novembre et aujourd’hui, nous prenons la mer direction Sète…
En fait, ça fait déjà quelques jours que nous attendions patiemment que le vent souffle moins et également du bon côté ! Ce jour, le vent s’est un brin calmé (tu parles) et le soleil devrait pointer le bout de son nez (bah voyons)…

Vers les 11 heures après avoir tout rangé et tout préparé, nous récupérons nos amarres et nous prenons la direction de la capitainerie afin d’y déposer la clé… C’est fait, allé en avant, le voilier se dirige à présent vers les digues pour sortir du port. Le vent souffle relativement bien, il fait froid et le temps est tout gris.

Et là, c’est le drame ! Le système de barre nous lache d’un seul coup en plein milieu de l’avant port ! La catastrophe, je me retrouve alors à essayer de stabiliser tant bien que mal le voilier en jouant avec le moteur pendant que Jean-Rémy plonge rapidement vers la cabine arrière pour voir ce qu’il se passe ! Il râle et jure en s’abimant les mains sur la chose. Moi, je ne comprend pas grand chose, un truc a bougé ? dévissé… Je me concentre juste pour que le bateau reste au milieu du bassin en faisant attention au vent. Après ce qui m’a semblé être une éternité, Jean-Rémy réapparait enfin et récupère la barre, enfin euh, le pilote automatique qui lui fonctionne plus ou moins. La barre est pour le moment hors-service.

Embruns dans ta poire

Nous revoilà tout près de la sortie du port, mené par un pilote automatique relativement handicapant du fait de son temps d’action qui s’avère être assez long. De plus, les vagues formées par un vent de 25 nœuds nous frappent brutalement de face et déstabilisent sans cesse la trajectoire du pilote. Jean-Rémy joue des boutons sur la commande automatique.
Le voilier zigzague dangereusement entre les deux digues. Les rochers se rapprochent, puis s’éloignent avant que ce soit ceux de l’autre côté qui semblent venir à notre rencontre. Pas croyants pour un sous, je crois qu’à ce moment-là nous avons tous les deux prié pour que ça passe ! Et c’est passé oui, mais sincèrement, pendant un bref instant, j’ai vu le voilier échoué sur une de ces digues…
A posteriori, je me demande vraiment pourquoi nous sommes quand même partis, sans barre. Cette situation aurait peut-être pu être dramatique et elle était un peu inconsciente.

Enfin, nous voici en mer. Le vent souffle maintenant plus fort et la mer est formée. Le voilier gigote tellement sur l’eau que nous décidons de mettre les gilets en sécurité. Un bout de génois seulement et nous filons déjà à 6 nœuds. Le voilier est un coup sur-toilé et un coup sous-toilé à cause des rafales qui vont jusqu’à 35 nœuds… Nous avançons alors à une vitesse variant entre 4 et 8 nœuds.

Le premier tiers de la navigation s’est plutôt bien passé, nous étions certes secoués mais toujours au sec donc le moral était là. Un soleil voilé nous accompagnait. Et puis ce fut l’anémomètre qui nous abandonna mais ce ne fut pas tragique en soi. A demi léthargique, je me sentais bien, je n’avais alors pas trop froid et je me laissais agréablement bercée par la houle. Nous étions au près serré et la barre remarchait à condition d’y aller molo.
Puis, c’est l’éolienne qui a fait des siennes. En effet, elle s’est mise tout d’un coup à hurler anormalement et à tourner à une vitesse inquiétante…

Le temps, le vent, la houle, tout ça s’est progressivement amplifié à notre grand désespoir. La mer est devenue toute hachée et le pont était trempé à chaque vague. La proue du voilier tapait dans les vagues avec bruit. Là, on a vraiment commencé à déchanter. Le froid nous grignotait malgré nos couches de vêtements. Les vagues se faisaient de plus en plus fortes nous arrosant froidement à chaque fois. Un bref allé-retour à l’intérieur du bateau signa pour moi le début des festivités. Après avoir dérapé dans la descente, j’ai la joie de dire bonjour aux nausées, sensation de mal-être, maux de ventre et d’estomac ! Et ni une ni deux me voici malade toute blafarde la tête au dessus de la cuvette ! Je suis vraiment pas bien et je maudis ce vent et surtout cette mer… A peine allongée dans le carré, les nausées m’assaillent de nouveau. Ça a duré un bon moment avant que poussée par Jean-Rémy, je réussisse à me trainer sur le pont. C’est horrible le mal de mer, j’avais l’impression que ça ne s’arrêterait jamais !
Tout est à présent mouillé, l’eau ruisselle sur les bancs du cockpit, le capitaine est à la barre, les mains et le visage bouffés par le froid. Chaque vague nous arrose gracieusement, nos jean’s sont trempés et nos pieds aussi.
Il fait trop froid, on grelotte, comme si nos tremblements pouvaient nous réchauffer mais je doute sérieusement sur cette possibilité. L’air et le froid me revigore peu à peu mais je reste faible.
Je m’imagine la chaleur d’une pièce chauffée et un bon repas chaud mais cette dernière pensée fait tressauter mon estomac. La fatigue nous gagne, et il faut dire que nous n’avons même pas pu manger un bout.

Nous sommes maintenant au moteur et nous filons droit vers le port de Sète.

Le temps parait s’éterniser.

Edit 2014 : Histoire de cowboys ! Aujourd’hui, on aurait fait demi-tour illico, et puis 25 nœuds au près avec un temps pourri, on est bien loin de la plaisance ! Remarquez nos pare-battages et les amarres qui trainent… C’est un peu du n’importe quoi. De toute façon, le mal de mer était lié au fait que j’avais la trouillasse !

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8 commentaires pour “Port Camargue – Sète, cette galère”

  1. Coqueline dit :

    Ben dis donc, pas cool, cette nav. Mais je suppose que tout s’est bien passé, puisque tu nous écris ce récit…
    La suite….STP

  2. cyril brocher dit :

    a la parrisienne, les parrebatages sur le pont…

  3. Julien dit :

    Bonjour à vous deux, purée quelle navigation, ça devait être pas genial mais vous avez réussis à mené le bateau à destination donc tout va bien ! super récit
    mes amitiés
    Julien

  4. Patrick dit :

    Bonjour Christelle . je te remercie pour le
    commentaire sur mon article. J’avais lu ton récit de la « traversée » de Port Camargue à Sète et j’avoue avoir eu froid dans le dos. Je n’ai rien dit de peur de passer pour un vieux radoteur de marin
    breton, mais maintenant je me lâche et te le dis franchement, c’est une grosse connerie d’avoir continué avec une barre HS et vous avez eu de la chance d’arriver au bout. La mer est un terrain de
    jeu qui peut apporter des satisfactions énormes et incroyables pour les pauvres terriens, mais il faut toujours la prendre au sérieux et partir avec un bateau dans un état irréprochable. Si les
    avaries surviennent au large OK on fait avec, mais on ne part avec une avarie. Surtout en novembre. Je vous souhaite de passer sur la mer autant de bons moments que moi j’en ai passé au cours de
    ces trente années passées sur l’eau salée . Amitiés.
    Pat29

  5. Patrick dit :

    Ok. C’est une façon de voir. Mais la bonne manoeuvre c’était retour au port et on mouille n’importe où à l’abri pour réparer. Il vaut mieux se faire engueuler par le capitaine de port que de faire
    sortir la SNSM ou de perdre sa peau. Si le capitaine de port est un marin il vous aurait aider à manoeuvrer pour vous mettre au bon endroit, s’il ne le fait pas c’est un âne. Je sais que c’est en
    faisant des conneries qu’on apprend, mais en mer la sanction peux être terrible. Si dans mon blog tu lis les pages »la vie d’une main » tu verras qu’en ce qui concerne les conneries, j’ai été un
    champion. C’est pourquoi je parle comme ça maintenant. J’ai eu de la chance, beaucoup de chance; d’autres y sont restés. Mon récit n’est pas terminé et il y a d’autres épisodes à venir pas tristes
    non plus.

  6. Patrick dit :

    Autre chose: tu dis on aurais pu sortir la barre franche. ma question est: pourquoi ne l’avez-vous pas fait? Je vais répondre: parce que lorsqu’on dégueule, on a envie de toutes sortes de choses
    sauf réparer un système de barre ou même installer une barre de secours bien planquée au fond d’un coffre, on ne sait d’ailleurs plus lequel. Autre question( le casse-co….e): Avez vous déjà
    installé la barre franche au port? Rien que pour voir comment on fait et si elle est utilisable telle quelle. J’ai convoyé des centaines de bateaux et je peux te dire par expérience que ceux qui
    font les bateaux ne les utilisent pas. Les morts ne viennent jamais se plaindre.
    Soyez vigilants. Amitiés. Patrick.

  7. Patrick dit :

    A quand le grand départ? Dans quelle direction?

  8. Christelle dit :

    Bonsoir Patrick ! Grand départ idéalement dans approximativement deux ans, le temps de tout préparer et faire la caisse de bord… Par rapport à la direction, on envisage de faire la route des
    Antilles par les alizés. Bon, faire un petit tour méditerranéen serait aussi le bienvenu pour commencer et pour ce printemps… On verra avec le temps, le boulot et comment tout va se
    magouiller…
    Bonne soirée :)

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